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Le pape François à Cuba

    L’Evangile (Mc 9, 30-37) nous présente Jésus posant une question apparemment indiscrète à ses disciples : «De quoi discutiez-vous en chemin ?» (Mc 9, 33) Une question qu’il pourrait nous poser aujourd’hui à nous aussi : De quoi parlez-vous chaque jour ? Quelles sont vos aspirations ? «Ils se taisaient, dit l’Evangile, car, en chemin, ils avaient discuté entre eux pour savoir qui était le plus grand.» Les disciples avaient honte de dire à Jésus ce dont ils parlaient. Chez les disciples d’hier, comme en nous aujourd’hui, peut se retrouver la même discussion : Qui est le plus important ? (…)

    Qui est le plus important ? Une question qui nous accompagnera tout au long de la vie et, à ses différentes étapes, nous serons confrontés au défi d’y répondre. Nous ne pouvons pas échapper à cette question gravée dans le cœur. Je me rappelle avoir entendu plus d’une fois, au cours de réunions de famille, demander aux enfants : qui aimes-tu le plus ? papa ou maman ? C’est comme vous demander : qui est le plus important pour vous ? Cette question est-elle seulement un simple jeu d’enfants ? L’histoire de l’humanité a été marquée par la manière de répondre à cette question. (…)

    Qui est le plus important ? Jésus est simple dans sa réponse : «Si quelqu’un veut être le premier, qu’il soit le dernier de tous et le serviteur de tous.» Si quelqu’un veut être grand, qu’il serve, qu’il ne se serve pas.

    Voilà le grand paradoxe de Jésus. Les disciples discutaient de celui qui occuperait la place la  plus importante, celui qui serait choisi comme le privilégié, qui serait exempté de la loi commune, de la norme générale, pour se faire remarquer dans une soif de supériorité sur les autres. Celui qui gravirait les échelons le plus rapidement pour occuper les charges qui confèreraient certains avantages. Jésus perturbe leur logique en leur disant simplement que la vie authentique se vit à travers l’engage-ment concret pour le prochain.

  L’invitation au service possède une particularité à laquelle nous devons être attentifs. Servir signifie, en grande partie, prendre soin de la fragilité. Prendre soin des membres fragiles de nos familles, de notre société, de notre peuple. Ce sont les visages souffrants, les personnes sans protection et angoissées que Jésus propose de regarder et invite concrètement à aimer. Amour qui se transforme en actions et en décisions. Amour qui se manifeste à travers les diverses tâches qu’en tant que citoyens, nous sommes invités à accomplir. Les personnes en chair et en os, avec leur vie, leur histoire et spécialement leur fragilité, sont celles que nous sommes invités par Jésus à défendre, à protéger, à servir. En effet, être chrétien implique servir la dignité de vos frères, lutter pour la dignité de vos frères et vivre pour la dignité de vos frères. C’est pourquoi le chrétien est toujours invité à laisser de côté, ses aspirations, ses envies, ses désirs de toute-puissance, en voyant concrètement les plus fragiles.

   Il y a un «service qui sert les autres» ; mais nous devons nous prémunir contre l’autre service, contre la tentation du «service» qui «se » sert des autres. Il y a une façon d’exercer le service qui vise comme intérêt le bénéfice des «miens», au nom de ce qui est «nôtre». Ce service laisse toujours les «tiens» dehors, en générant une dynamique d’exclusion.

   Nous sommes tous appelés par vocation chrétienne au service qui sert et à nous aider mutuellement à ne pas tomber dans les tentations du «service qui se sert». Nous sommes tous invités, stimulés par Jésus, à nous prendre en charge les uns les autres par amour. Et cela, sans regarder de côté pour voir ce que le voisin fait ou a manqué de faire. (…)

   Cette prise en charge mutuelle par amour ne vise pas à asservir, au contraire, elle met le frère au centre de la question : le service vise toujours le visage du frère, il touche sa chair, il sent sa proximité et même dans certains cas, la «souffre» et cherche sa promotion. Voilà pourquoi le service n’est jamais idéologique, puisqu’il ne sert pas les idées, mais les personnes. (…)

 

   N’oublions pas la Bonne Nouvelle d’aujourd’hui : l’importance d’un peuple, d’une nation, l’importance d’une personne se fonde toujours sur la façon dont elle sert la fragilité de ses frères. Et en cela, nous trouvons l’un des fruits d’une vraie humanité.

   Car, chers frères et soeurs, la vie de celui qui ne vit pas pour servir ne vaut pas la peine d’être vécue.

 Extrait de l'homélie du Pape François

Place de la Révolution, La Havane, Cuba

        Dimanche 20 septembre 2015

 

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